titre original | "Prince of Darkness" |
année de production | 1987 |
réalisation | John Carpenter |
scénario | John Carpenter |
photographie | Gary B. Kibbe |
musique | John Carpenter et Alan Howarth |
interprétation | Donald Pleasence, Victor Wong, Dennis Dun, Alice Cooper |
récompense | Prix de la critique au festival international du film fantastique d'Avoriaz 1988 |
La critique de Didier Koch pour Plans Américains
Quand il se lance dans le projet de "Prince des ténèbres", John Carpenter a déjà commencé à rompre les amarres avec les studios. Les budgets plus importants que lui ont amenés ses succès des débuts comme "Halloween", "Fog" ou encore "Christine" n'ont pas été couronnés de succès. "The Thing", qui reste sans aucun doute son chef-d'œuvre, a pâti de sa sortie quasiment simultanée avec "E.T. l'extra-terrestre" qui provoqua une vague déferlante qui rafla tout sur son passage. "Les Aventures de Jack Burton dans les griffes du mandarin" sorti quatre ans plus tard fut un aussi bide commercial retentissant.
"Pourquoi s'infliger tant de contraintes pour un résultat si décevant ?" C'est la réflexion qui trotte certainement dans la tête de Carpenter quand il s'engage, avec la société de production Alive Film, pour trois films à budgets réduits (3 millions de dollars maximum pour chaque film) en échange d'un contrôle artistique total. Débarrassé des contraintes qui collent mal avec son caractère indépendant, le réalisateur montre encore une fois qu'il est capable de "faire le coup" avec des bouts de ficelles.
L'histoire, qu'il concocte sous le pseudonyme de Martin Quatermass en hommage au héros de la Hammer interprété par Brian Donlevy ("Le Monstre" en 1955, suivi de "La Marque" en 1957), n'est pas des plus harmonieusement charpentées. Peu fournie en rebondissements et offrant une crédibilité plus que chancelante, elle annoncerait à coup sûr une catastrophe pour tout autre réalisateur que Carpenter. Mais grâce au score musical qu'il compose lui-même comme à chaque fois, il parvient à créer une ambiance de fin du monde captivante qui, à elle seule, réussit l'exploit de tenir le spectateur accroché à ce manège incroyable qui se déroule dans une église abandonnée de la banlieue de L.A., où de jeunes étudiants se mêlent à une bande de scientifiques improbables (dont le pittoresque Victor Wong) et à un prêtre complètement halluciné joué par le toujours convaincant Donald Pleasence que Carpenter connaît bien, pour conjurer ce qui ressemble fort à une annonce d'apocalypse imminente.
Une petite dose d'humour ajoutée à l'ensemble permet de faire monter une mayonnaise qui avait, il faut bien le reconnaître, toutes les chances de mal tourner confiée à des mains moins expertes. La présence d'Alice Cooper parmi les clochards constituant l'armée de réserve au service de l'Antéchrist qui se réveille dans un bocal (!) enfermé dans les sous-sols de l'église en ébullition renforce encore le charme de ce petit film de série B envoûtant en dépit de ses quelques manques narratifs. Renouant avec la rentabilité, John Carpenter continuera sur sa lancée jusqu'à une semi-retraite prise en 2001 après "Ghosts of Mars", qui le verra alterner productions de remakes de ses films et compositions musicales.
La chronique de Gilles Penso