titre original | "Author! Author!" |
année de production | 1982 |
réalisation | Arthur Hiller |
scénario | Israel Horovitz |
photographie | Victor J. Kemper |
musique | Dave Grusin |
interprétation | Al Pacino, Dyan Cannon, Tuesday Weld |
La critique de Didier Koch pour Plans Américains
En 1975, le succès d'"Un après-midi de chien" de Sidney Lumet finit de classer Al Pacino dans la catégorie des acteurs prisés par les metteurs en scène dits "intellectuels". Avec à son actif les deux épisodes du "Parrain", il est normalement sur une trajectoire montante. Malheureusement, les quatre films qui vont suivre ("Bobby Deerfield", "Justice pour tous", "Cruising" et "Avec les compliments de l'auteur") vont s'avérer de véritables échecs commerciaux et critiques, ramenant l'acteur à un relatif anonymat. Heureusement, Brian De Palma, en lui proposant le remake latino et ultra violent de "Scarface", remettra définitivement la carrière de Pacino sur les rails.
"Avec les compliments de l'auteur" d'Arthur Hiller, metteur en scène spécialisé dans les comédies, ayant paradoxalement connu le succès avec le très larmoyant "Love Story", Pacino tente d'inverser la spirale de l'échec en proposant une autre facette de son jeu. Le film, écrit par l'auteur de théâtre Israel Horovitz que Pacino connaît bien ("Indian wants the Bronx" fut le premier grand succès off Broadway de l'acteur), aborde, à travers les péripéties maritales d'un auteur de théâtre new-yorkais, l'expression ultime du féminisme qui constitue, depuis le désenchantement de l'American way of life, un des grands mouvements de fond de la société américaine.
Ivan Travalian (Al Pacino), qui doit batailler ferme pour imposer son travail dans le milieu très concurrentiel de la scène new-yorkaise, est au centre d'une famille recomposée de cinq enfants nés de quatre mariages différents. Horovitz renverse complètement les valeurs, faisant pour une fois de la femme jouée par Tuesday Weld, ancienne compagne de Pacino, celle qui déserte le foyer pour laisser libre cours à ses pérégrinations amoureuses, abandonnant à son compagnon du moment le soin de veiller sur la fratrie. C'est ainsi qu'Ivan connait les joies ou vicissitudes habituellement réservées à la gent féminine de s'occuper des devoirs, de faire à manger et d'attendre au lit inquiet que sa compagne daigne rentrer au nid. Le tout en tentant de mener une carrière professionnelle plus qu'incertaine.
Tous petits drames du quotidien que l'on regarde habituellement avec un certain amusement, voire avec une empathie certaine, et qui vus à front renversé, nous paraissent improbables tellement engoncés dans nos convenances que nous sommes. C'est le tour de force du film que de nous obliger à voir les choses autrement tout en lui conservant, grâce au jeu enlevé de Pacino, un aspect sympathique permettant de prendre la distance utile face à une situation somme toute assez dramatique qui pourrait conduire à porter un jugement sans appel sur une mère facilement considérée comme indigne. Cet aspect n'a pas été perçu, ou mal reçu, et le film a été vilipendé par la critique, flanquant Pacino d'un nouvel échec qui le dissuadera de creuser davantage cette veine comique.
Éminemment sympathique avec cette bande de mioches qui, face à une mère instable, décident de prendre leur avenir en main en se choisissant eux-mêmes leur foyer, et malgré quelques invraisemblances scénaristiques, ce film oublié de l'imposante filmographie de Pacino mérite d'être réévalué.