titre original | "Shadowlands" |
année de production | 1993 |
réalisation | Richard Attenborough |
scénario | William Nicholson, d'après sa propre pièce éponyme |
photographie | Roger Pratt |
musique | George Fenton |
interprétation | Anthony Hopkins, Debra Winger, Edward Hardwicke |
La critique de Didier Koch pour Plans Américains
Clive Staples Lewis (1898-1963) était un poète et écrivain pour enfants, anglais, revenu au goût du jour depuis que son œuvre en sept volumes "Le Monde de Narnia" a été portée à l’écran par les Studios Disney en 2005. En 1985, l’écrivain anglais William Nicholson s’était inspiré d’un épisode tout à la fois heureux et tragique de la vie de Lewis pour écrire le scénario d’un téléfilm qui, sous sa même plume, devint une pièce qui recueillit un véritable succès. En 1993, c’est Richard Attenborough, acteur reconverti réalisateur, récompensé d’un Oscar pour "Gandhi" (1983), qui se charge de mettre en scène pour le cinéma ce mélodrame déchirant, qui se révèle au final être une véritable ode à la vie.
Clive Staples Lewis, vénérable professeur de lettres à Oxford, célibataire endurci qui vit avec son frère, est tombé tardivement amoureux de Joy Davidman, poétesse américaine juive aux convictions communistes. Quand ils se marient, la jeune femme se sait déjà atteinte d’un cancer incurable. C’est tout le cheminement des deux êtres l’un vers l’autre, suivi presque aussitôt de l’obligation de se préparer à la mort du plus jeune des deux, qui doit être relaté à l’écran sans tomber dans le mélo larmoyant qui constituait le piège facile dans lequel Richard Attenborough devait éviter de tomber.
Au-delà de la réalisation, c’est bien sûr le casting des deux acteurs principaux qui conditionnait la réussite de l’entreprise. La réunion d’Anthony Hopkins et de Debra Winger qui promettait d’être explosive, peut être considérée comme miraculeuse, à l’image de la rencontre entre Lewis et Davidman. Anthony Hopkins, plus âgé que Debra Winger comme l’exige le rôle, est en pleine ascension depuis son Oscar pour "Le Silence des agneaux" (1991), alors que la jeune actrice, dont le caractère volcanique est depuis ses débuts comparé à celui de Bette Davis, s’apprête progressivement à faire ses adieux à Hollywood.
Le cabotinage n’est pas inconnu d’Anthony Hopkins, qui en a tiré tout le profit pour son interprétation d’Hannibal Lecter. Comme James Ivory juste avant lui pour "Les Vestiges du jour", Attenborough tirera le meilleur du grand acteur, qui n’est jamais aussi convaincant que lorsque son jeu est empreint de sobriété. En face de lui, Debra Winger, pour sa dernière grande prestation qui lui vaudra une nomination pour l’Oscar, imprègne son jeu de toute la détermination de son regard pénétrant, qui peut, quand il le faut, se teinter de la lassitude et de l’abandon qui accompagnent l’acceptation de la mort par Joy Davidman.
À leurs côtés, Edward Hardwicke, qui fut le remarquable docteur Watson, compagnon d’enquête du non moins remarquable Sherlock Holmes que fut de Jeremy Brett (série télévisée anglaise de 1986 à 1994), est confondant d’humanité. L’ensemble mis en lumière par Roger Pratt, l’opérateur attitré des premiers films de la bande des Monty Python, nous emmène pour un voyage nostalgique et romantique dans l’Angleterre encore un peu figée des grandes universités de l’Après-guerre.