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"Faut-il tuer Sister George ?"

Faut-il tuer Sister George - affiche

titre original "The Killing of Sister George"
année de production 1968
réalisation Robert Aldrich
scénario Lukas Heller, d'après la pièce de Frank Marcus
photographie Joseph F. Biroc
musique Gerald Fried
production Robert Aldrich
interprétation Beryl Reid, Susannah York, Coral Browne, Ronald Fraser

Critique extraite du Guide des films de Jean Tulard

Un sujet audacieux pour l'époque : l'homosexualité féminine. Mais aussi une féroce satire des milieux de la télévision. Premier film tourné par Aldrich dans ses studios.

La critique de Sébastien Miguel pour Plans Américains

La chute. Inexorable, interminable et pathétique. Outrances innombrables : Aldrich filme sans aucune retenue, avec un regard à la fois impitoyable et compatissant.

Sister George (Beryl Reid, dans l’une des plus époustouflantes créations de l’histoire du cinéma) joue une adorable petite religieuse dans un soap anglais parfaitement idiot. À la ville, c’est une grosse vache alcoolique, jalouse, grossière et brutale. Sa solitude et son désespoir ne sont pourtant jamais dissimulés, et ce, dès le premier plan - saisissant - du film.

Le monde qui l’entoure est immonde et hypocrite, symbolisé par le personnage terrible et magnifiquement joué par Coral Browne. Le cinéaste, multipliant les lieux clos claustrophobiques, croque en quelques plans un bestiaire impressionnant constitué d’imbéciles, de menteurs et de salauds. Mention spéciale à l’inénarrable Ronald Fraser ("Le Vol du Phénix", "Trop tard pour les héros").

Dans son radicalisme, Aldrich annonce Fassbinder. Un chef-d’œuvre.

Critique extraite du Cinéma américain 1955-1970 de Freddy Buache

Lorsqu'il ne tourne pas des films de guerre ou d'action qui lui rapportent beaucoup d'argent (comme, par exemple, "Les Douze Salopards"), Robert Aldrich s'acharne à mettre en scène des sujets logiquement voués au plus total insuccès puisqu'ils prennent le public à rebrousse-poil et présentent avec une lourdeur volontairement appuyée un extravagant déballage de laideurs, d'atrocités intimes, de perversions, de mascarades sinistres et d'humour noir, jaune ou gris, délibérément infléchi vers le mauvais goût.
Sans doute, cette part maudite de l'œuvre d'un cinéaste qui connaît parfaitement les recettes de la réussite, devrait-elle être soumise à une étude psychanalytique. Et nous devinons déjà qu'elle mettrait en lumière le profond désenchantement d'un homme qui fut choyé puis brusquement honni par Hollywood, et qui gagna tout seul une position dominante d'où il peut narguer ses anciens et hypocrites flatteurs. Il sait mesurer la relativité de toute renommée et ne se fait plus guère d'illusions à propos de ceux qui, de grenouillage en grenouillage, font la loi dans les milieux du spectacle. Il ne peut oublier que les gloires s'établissent très souvent sur la vilenie, que les détails sordides grouillent dans les coins du décor le plus séduisant, que le luxe et l'apparat n'empêchent pas de ressentir la solitude, l'angoisse, ni surtout les attaques perfides du vieillissement.
Fasciné par la gérontocratie, Aldrich collectionne à l'écran, dans les œuvres qui lui sont personnelles, des portraits de femmes vieilles, méchantes, libidineuses : ce nouveau film se situe dans la suite de ces parades de monstres féminins : "Qu'est-il arrivé à Baby Jane ?" ou "Chut... chut, chère Charlotte". Nous assistons sur les visages au travail de la mort.
(...)

Robert Aldrich et Frank De Vol

Alors que les deux hommes étaient fidèles l'un à l'autre depuis de nombreux films (dont "Qu'est-il arrivé à Baby Jane ?", "Chut... chut, chère Charlotte", "Le Vol du Phénix" et "Le Démon des femmes"), De Vol quitta la production de "Faut-il tuer Sister George ?" du fait de la scène d'amour lesbien et ne collabora de nouveau avec Aldrich que plusieurs années plus tard.

Affiche française de "Faut-il tuer Sister George ?" © Boris Grinsson

Faut-il tuer Sister George - générique