21e volet de la saga James Bond
titre original | "Casino Royale" |
année de production | 2006 |
réalisation | Martin Campbell |
scénario | Neal Purvis, Robert Wade et Paul Haggis, d'après le roman éponyme de Ian Fleming |
photographie | Phil Meheux |
musique | David Arnold |
production | Barbara Broccoli et Michael G. Wilson |
interprétation | Daniel Craig (1re interprétation du personnage), Eva Green, Judi Dench ("M"), Jeffrey Wright (Felix Leiter), Mads Mikkelsen, Sébastien Foucan |
Critique extraite du Guide des films de Jean Tulard
Martin Campbell avait orchestré le retour de 007 dans "GoldenEye" en 1995 avec Pierce Brosnan, qui s'était employé à rendre le personnage plus dur et plus humain. Avec ce nouveau volet, la rupture est consommée : Daniel Craig incarne avec brio un James Bond brutal, violent et sombre... Si les fans de la plus longue série cinématographique y ont perdu leurs repères - ni humour, ni Q, ni Moneypenny... -, les amateurs de l'œuvre de Ian Fleming y ont trouvé une adaptation très fidèle du premier roman.
La critique de Didier Koch pour Plans Américains
Après avoir démissionné Pierce Brosnan suite à son quatrième James Bond, EON Productions se met à la recherche du nouvel agent secret de Sa Majesté. Sont en concurrence, Jude Law, Colin Farrell, Ewan McGregor, Orlando Bloom, Christian Bale ou encore Hugh Jackman. C’est finalement Daniel Craig qui, le 14 octobre 2005, est officiellement déclaré nouveau James Bond. De tous les prétendants, il est le moins connu, s’étant fait remarquer seulement deux ans plus tôt dans "Layer Cake" de Matthew Vaughn, puis dans "Munich" de Steven Spielberg. Avant de rejoindre le plateau, l’acteur se soumet à une période intensive de bodybuilding.
On comprendra très vite, aux premières images de "Casino Royale", que ce n’est peut-être pas par hasard que le livre de Ian Fleming servant d’inspiration aux scénaristes soit le premier où apparaît James Bond. C’est en effet comme une nouvelle page à écrire qui s’ouvre, permettant à l’agent 007 d’entrer définitivement dans ce nouveau siècle où les effets spéciaux sont rois. Si Pierce Brosnan avait assuré une transition plus que bénéfique sur les recettes de la saga, les producteurs n’étaient pas sans ignorer que, sous l’impulsion de Bruce Willis et de John McTiernan, initiateurs de la franchise "Die Hard" dès la fin des années 80, le style distingué de James Bond pouvait rapidement paraître désuet. Le clou a été enfoncé encore un peu plus avec la saga "Mission : impossible", donnant à voir un Tom Cruise éternellement jeune, renversant tout sur son passage, suivie par celle des "Jason Bourne" inspirée de l’œuvre de Robert Lundlum, révélant un Matt Damon aussi efficace que sobre.
James Bond vient tout juste d’accéder à son statut de double zéro lui donnant accès au fameux permis de tuer, dont il va immédiatement se servir sans modération, déclenchant au passage l’ire de « M », qui le juge dangereux. Le prologue traditionnel imprime immédiatement la nouvelle tonalité au moyen d’une course poursuite sur les toits de Madagascar, inspirée de la nouvelle mode des acrobates urbains. Moins de gadgets farfelus (« Q » a disparu), mais plus d’acrobatie, de brutalité et de muscles saillants. On comprend mieux dès lors le choix de Daniel Craig, sans aucun doute le plus marmoréen des successeurs possibles de Pierce Brosnan. L’acteur est à son affaire, qui n’a pas à faire dans la nuance pour habiter un rôle qui, quelques années plus tôt, lui aurait été refusé. Il avance au pas de charge, et l’action avec lui, que l’on a bien du mal à suivre entre deux de ces fameuses courses poursuites qui, à la longue, paraissent interminables.
En fait, il ne reste pas grand-chose de ce qui faisait l’attrait d’une saga s’étant construite sur l’exotisme, la dérision, le charme et l’action. James Bond voyage toujours autant, mais il passe tellement vite d’un endroit à l’autre que le spectateur n’a jamais le temps d’habituer son regard à des paysages et décors qui ne sont jamais réellement magnifiés, tenant juste lieu d’artefacts aux combats que mène un Daniel Craig ne ménageant pas sa peine. Eva Green, bonne actrice au demeurant, tente bien de donner un peu de substance à son personnage, mais elle finit par être emportée dans le tourbillon de l’action. Idem pour les méchants, qui n’impriment guère plus.
En réalité, c’est bien sur le seul registre où brillent les Jason Bourne et autres Ethan Hunt qu’Eon Productions entend placer la prolongation d’une franchise déjà ancienne. Les fans de la première heure seront peut-être déstabilisés, mais ils ne représentent pas l’avenir, et le box-office a par ailleurs validé cette stratégie. L’affaire est donc entendue. Daniel Craig a de beaux jours devant lui.
La chronique de Gilles Penso
Le topo de Gilles Penso sur la musique du film