titre original | "El Dorado" |
année de production | 1966 |
réalisation | Howard Hawks |
scénario | Leigh Brackett, d'après le roman "The Stars in Their Courses" de Harry Brown |
photographie | Harold Rosson |
musique | Nelson Riddle |
production | Howard Hawks |
interprétation | John Wayne, Robert Mitchum, James Caan, Charlene Holt, Paul Fix, Arthur Hunnicutt, Christopher George |
Critique extraite du Guide des films de Jean Tulard
Variation sur le sujet de "Rio Bravo". Mais on aurait tort de croire à un pastiche, voire à un plagiat de soi-même. Hawks se rend compte que le western vieillit et, au contraire de ceux qui fabriquent des anti-westerns, ou des "nouveaux" westerns, il montre ses héros puisant dans leurs faiblesses et leurs infirmités (Thornton a une balle fichée dans la colonne vertébrale qui le paralyse par moments) la force de vaincre. Cette critique implicite de l'intellectualisme des années soixante n'est-elle pas magnifiquement exprimée dans une réplique de Bull Harris [le shérif adjoint interprété par Arthur Hunnicutt, NDLR] : « Agissons avant de trop réfléchir » ?
Extrait de la chronique du 2 décembre 2015 de Bertrand Tavernier
À la suite de diverses interventions, j’ai décidé de revoir "La Reine de la prairie" et "El Dorado". [...] "El Dorado" est très supérieur et Mitchum apporte beaucoup, surtout dans le premier tiers du film, de loin le meilleur. Mais l’ensemble paraît quand même fatigué, même si Hawks fait preuve d’un certain rythme qu’il conjugue avec sa décontraction légendaire. Le scénario semble fait de bric et de broc (la découverte de Mitchum devenu ivrogne est traitée avec une désinvolture peu payante) pour en arriver obligatoirement à une resucée de "Rio Bravo" que le premier tiers n’annonce pas du tout. Il est d’ailleurs intéressant de noter que la meilleure scène du film est la seule qui soit tirée du beau roman de Harry Brown : quand Wayne tire sur le jeune qui était censé le surveiller et prévenir de son arrivée et le tue par erreur. Dans le livre, la scène était beaucoup plus forte. Elle arrivait plus tard dans l’intrigue et donc on connaissait le jeune qui allait mourir, on l’avait aimé et on ressentait plus fortement sa perte. La séquence dans la famille était plus forte avec une série de réactions complexes. Leigh Brackett fut furieuse d’écrire ce qu’elle appelait « le fils de "Rio Bravo" » et cela se sent. James Caan est pas mal dirigé avec son sourire, mais les divers trajets et allers et retours dans la dernière partie semblent fastidieux et bâclés quant au traitement de l’espace. Même la photographie de Harold Rosson, qui joue exclusivement sur le jaune des fenêtres, paraît moins intéressante que celle de "Rio Bravo".
Extrait de la chronique du 11 mai 2016 de Bertrand Tavernier
Parmi tous ceux qui ont débattu sur les mérites d'"El Dorado", il va bien y en avoir un ou deux qui vont se reporter au magnifique roman de Harry Brown, "Du haut des cieux les étoiles", que j'ai fait traduire chez Actes Sud. Ne serait-ce que pour comprendre pourquoi Hawks n'a pas osé, contrairement à sa scénariste, affronter le roman. Il est passionnant d'analyser les sources romanesques des films, ce qu'on ne faisait qu'avec les chefs-d'œuvre de la littérature, Stendhal, Hugo, Balzac, Maupassant, Melville, Faulkner. C'est plus juste et payant pour « les films de genre ». [...] À l'époque d'"El Dorado", il [Hawks, NDLR] se replie davantage sur des formules qu'il a déjà utilisées, et c'est ce qui le différencie de Huston. Il est donc fascinant de repérer ce qui a pu lui faire peur.
La critique de Sébastien Miguel pour Plans Américains
Dernier des grands westerns hollywoodiens, "El Dorado" impressionne encore aujourd'hui.
Les ramifications remarquables d'un scénario enchaînant les péripéties, mais restant toujours soucieux de donner aux personnages une épaisseur et une profondeur étonnantes. Les scènes d'action, très fortes et brutales, côtoient les plus détectables des scènes de comédie (Hawks étant l’un des maîtres de la comédie sophistiquée américaine).
Les acteurs (tous délicieux) font des merveilles. Passant du shérif inoxydable à l’épave poisseuse, Robert Mitchum est juste fabuleux.
Conscients du temps et de l’âge de ses stars, les auteurs abordent brillamment les thèmes à venir du western crépusculaire : vieillesse, déchéance physique, explosion de violence.
Univers d'hommes, de professionnels, où seules les femmes ont la clé, l'œuvre réunit tous les thèmes du réalisateur des "Hommes préfèrent les blondes".
Une véritable leçon de cinéma.




