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"Le Cas Richard Jewell"

Le cas Richard Jewell - affiche

titre original "Richard Jewell"
année de production 2019
réalisation Clint Eastwood
scénario Billy Ray, d'après l'article de Marie Brenner ("American Tragedy: The Ballad of Richard Jewell", Vanity Fair, février 1997)
photographie Yves Bélanger
musique Arturo Sandoval
interprétation Paul Walter Hauser, Sam Rockwell, Olivia Wilde, Kathy Bates

La critique de Sébastien Miguel pour Plans Américains

Remake de "Sully" ou énième film de propagande pro-Trump d'un cinéaste légendaire ayant renoncé à faire du cinéma ?

L'idéologue et son inclinaison aux racolages démago à la Trump peuvent faire vomir. Pourtant, le drame de cette fin de carrière est réel. Ses pensums exécrables reflètent tous les croyances et la vraie sincérité de leur auteur.

Alors que dire ????

Niveau cinéma : il n'y a presque plus rien, sauf deux montages parallèles (un nul et l'autre bien) et une scène d'anthologie où tout le monde se tortille sur 'La Macarena' !

Les héros synthétisant les nobles valeurs (républicaines) restent les Américains bas du front passionnés par les armes à feu et par la puissance militaire de leur pays. Les mères sont exemplaires, et l'amitié demeure le seul rempart face à la folie meurtrière du monde.

Le F.B.I. ? Toujours dans l'erreur. Les médias ? Une horde de vampires assoiffés de sang, dont Olivia Wilde (arriviste, diabolique et... éblouissante de beauté !) serait l'incarnation suprême.*

Le film se clôt par un discours simple sur la vacuité de bafouer l'héroïsme et résonne avec une naïveté confondante.

Désarmant.

* On peut tout à fait voir une nouvelle accusation de la part d'Eastwood envers les lobbies malfaisants (enquêteurs, médias) qui cherchent régulièrement des poux dans la chevelure orangée de Trump...

La critique de Didier Koch pour Plans Américains

À près de 90 ans, Clint Eastwood réalise, avec "Le Cas Richard Jewell", son trente-neuvième long métrage. Depuis "L’Échange" en 2008, il puise dans des faits réels afin d’observer le comportement d’individus lambdas face à des situations qui les confrontent à l’adversité et parfois même à l’ingratitude. Ainsi, Angelina Jolie, dont le fils est kidnappé, se coltine à la police lorsque celle-ci veut lui imposer un enfant qu’elle ne reconnaît pas comme le sien ("L’Échange"). C’est ensuite Bradley Cooper, qui interprète Chris Kyle, champion de rodéo devenu le plus efficace sniper de l’armée américaine présente en Irak ("American Sniper"). Dans "Sully" (2016), Tom Hanks incarne le pilote de l’US Airways qui, le 15 janvier 2009, effectue un amerrissage forcé sur le fleuve Hudson pour sauver ses passagers et dont le choix sera remis en cause par les autorités de sécurité. "Le 15h17 pour Paris" s’intéresse au comportement héroïque de trois jeunes touristes américains déjouant un attentat terroriste à bord d’un TGV. "La Mule", enfin, où Clint Eastwood reprend du service en tant qu’acteur pour camper un horticulteur retraité, ancien de Corée devenu passeur de drogue pour venir en aide à sa famille.

Pour "Le Cas Richard Jewell", le réalisateur est arrivé assez tard sur le projet initialement prévu pour Paul Greengrass, avec Jonah Hill et Leonardo DiCaprio dans les deux rôles principaux. Il a choisi Paul Walter Hauser, acteur assez peu connu, pour incarner Richard Jewell, et Sam Rockwell pour tenir le rôle de son avocat. Richard Jewell, jeune homme plus que rondouillard, vivant chez sa mère (formidable Kathy Bates), a toujours rêvé de faire partie des forces de police. Son zèle associé à une conception un peu rigide de l’action policière lui a déjà valu quelques déboires. En 1996, alors qu’Atlanta accueille les Jeux Olympiques du centenaire, son implication sans faille lui permet de sauver de nombreuses vies alors qu’une bombe explose lors d’un concert aux abords du stade. Tout d’abord adulé et présenté comme un héros, il devient rapidement la cible du F.B.I. qui, pour masquer ses déficiences alors que ses agents étaient sur place, en fait un suspect potentiel. Dans la foulée, les médias s’emparent de l’affaire.

Avec la sobriété habituelle de sa mise en scène, Eastwood maîtrise parfaitement son sujet proposant un mélange subtil entre suspense juridique et démonstration de la capacité des institutions à s’allier pour broyer un homme quand des « intérêts supérieurs » sont en jeu. Le film pose in fine, à travers Richard Jewell et sa formidable interprétation par Paul Walter Hauser, la question de l’engagement personnel des individus quand, au-delà du manque compréhensible de courage, tout les incite à détourner la tête ou à passer leur chemin. Guère de surprise donc concernant un Clint Eastwood ayant depuis longtemps montré son savoir-faire dans le domaine du cinéma de divertissement engagé, mais surtout le plaisir de le voir mettre son talent au service d’un jeune acteur en devenir, dont il exploite avec pudeur et justesse la capacité à émouvoir. Si son cinéma est devenu un peu plus consensuel et parfois un peu moins percutant, le grand Clint Eastwood a toujours des choses à dire, à défaut d’en avoir encore à prouver.

Le cas Richard Jewell

Le cas Richard Jewell - Positif
Couverture du numéro de février 2020 de la revue Positif