titre original | "Lonely Are the Brave" |
année de production | 1962 |
réalisation | David Miller |
scénario | Dalton Trumbo, d'après le roman "The Brave Cowboy" de Edward Abbey (1956) |
photographie | Philip H. Lathrop |
musique | Jerry Goldsmith |
production | Edward Lewis |
interprétation | Kirk Douglas, Gena Rowlands, Walter Matthau, George Kennedy |
Critique extraite du Guide des films de Jean Tulard
Un très beau film qui repose sur un magnifique sujet, et un excellent comédien, très à l'aise dans un rôle qui doit lui rappeler "L'Homme qui n'a pas d'étoile".
Critique extraite de 50 ans de cinéma américain de Bertrand Tavernier et Jean-Pierre Coursodon
Il n'y a plus de place pour l'individualisme des hommes de l'Ouest dans la vie moderne. Héros pas fatigué mais inadapté, Kirk Douglas en meurt, solitaire à cheval traqué par des hélicoptères, écrasé par un camion sur une route nationale. Mais ce qui meurt vraiment, ici encore, c'est l'Ouest et le western.
La critique de Didier Koch pour Plans Américains
Après avoir lu "The Brave Cowboy" (paru en 1956) d'Edward Abbey, écrivain radicalement écologiste, Kirk Douglas réussit à convaincre Universal de distribuer une adaptation du roman qui serait produite par Joel Production, sa propre société. Le scénario est confié à Dalton Trumbo, revenu en grâce depuis "Spartacus" et "Exodus".
Dalton Trumbo, qui a durement subi la folie persécutrice du sénateur McCarthy, saisit parfaitement l'âme profonde du cowboy solitaire joué par Kirk Douglas, qui entend défendre jusqu'au bout sa liberté de vivre à sa manière dans une société consumériste qui formate à grand pas et par strates tous les comportements sociaux. S'il revient au Nouveau-Mexique, c'est pour sortir de prison son ami d'enfance condamné pour avoir aidé des réfugiés mexicains clandestins. John W Burns (Kirk Douglas) est l'un de ces nostalgiques du temps des pionniers, quand l'immense pays était une terre encore vierge que l'on pouvait sillonner à cheval sans entrave autre que les éléments naturels avec lesquels il fallait composer.
Trumbo, complétement imprégné de la teneur du livre d'Abbey, scande son récit de symboles rappelant que cette courte période de l'histoire est bel et bien révolue. Les barbelés qui lui barrent régulièrement son chemin, obligent Burns à user d'une pince sans doute achetée chez un quincaillier, tout comme la traversée d'une autoroute encombrée se transforme en épreuve mortelle pour sa jument. La vision de Burns et de son cheval dans le rétroviseur d'un routier ayant manqué de les écraser martèle, par le biais de la métaphore, que le cowboy n'est plus qu'un lointain souvenir pour tous ces gens occupés par l'activité capitaliste qui a depuis longtemps remplacé l'économie agraire. Dès lors, le salut pour Burns est toujours plus loin, par-delà les montagnes quand il doit fuir la police à ses trousses après qu'il se soit évadé de la prison où il avait rejoint son ami.
Commence alors la partie la plus bouleversante du film où Burns, en parfaite osmose avec sa jument pourtant effrayée par les pentes escarpées et les ravins, se lance le défi de franchir l'obstacle avec celle qui est désormais sa compagne de tous les instants. À ses trousses, un hélicoptère, un gardien sadique (George Kennedy) et un shérif local débonnaire (génial Walter Matthau) qui ne met pas beaucoup d'entrain à la tâche, sans doute en sincère empathie avec ce dinosaure des temps modernes qui ne veut rien renier de ses convictions.
Magnifiquement photographié par Philip H. Lathrop, "Seuls sont les indomptés" s'inscrit dans la lignée des westerns de Sam Peckinpah qui, comme leur auteur, étaient imprégnés d'un Ouest finissant que quelques rêveurs suicidaires ne voulaient pas laisser mourir. On pense aussi au sublime et maudit "Deux hommes dans l'Ouest" de Blake Edwards (1971) ou encore au trop méconnu "Cavalier électrique" de Sydney Pollack (1979).
Kirk Douglas à l'initiative heureuse du projet n'a sans doute jamais été aussi convaincant, délaissant les tics qui parfois encombraient son jeu, et apportant toute son incroyable énergie physique dans l'épisode montagnard en compagnie d'un cheval qu'il fallait bien maîtriser pour qu'il ne le précipite pas dans le ravin.
Ceux qui n'ont pas vu "Seuls sont les indomptés", dont le titre résume à lui seul toute la symbolique du film, doivent absolument combler ce manque. Ils ne seront pas déçus.