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"Les Anges de la nuit"

Les anges de la nuit - affiche

titre original "State of Grace"
année de production 1990
réalisation Phil Joanou
scénario Dennis McIntyre
photographie Jordan Cronenweth
musique Ennio Morricone
montage Claire Simpson
interprétation Sean Penn, Ed Harris, Gary Oldman, Robin Wright, John Turturro, Burgess Meredith, R.D. Call, Joe Viterelli, John C. Reilly

La critique de Didier Koch pour Plans Américains

La carrière de Phil Joanou aura rapidement tourné court. Propulsé sur le devant de la scène grâce à "Rattle and Hum", son documentaire sur le groupe U2 en tournée aux États-Unis alors à son sommet, il réalise en 1990 le très noir "Les Anges de la nuit", aujourd'hui considéré comme son chef-d'œuvre. Le film, favorablement accueilli par la critique, a eu la malchance de sortir la même semaine que "Les Affranchis" de Martin Scorsese. C'est un flop commercial. Joanou se remet en selle avec le beaucoup plus convenu "Sang chaud pour meurtre de sang-froid" bénéficiant de la présence au générique du couple très sexy formé par Richard Gere et Kim Basinger. Quatre ans plus tard, le bide au box-office que sera "Vengeance froide" lui enlève définitivement la confiance des studios.

Reste donc "Les Anges de la nuit", qui bénéficie aujourd'hui d'un statut culte inaltérable auprès des amoureux du film de gangsters, Joanou parvenant à une sorte de perfection visuelle et sonore grâce à la collaboration du chef-opérateur Jordan Cronenweth ("Au-delà du réel", "Cutter's Way", "Blade Runner") et du compositeur Ennio Morricone, qui remplace au pied levé le groupe U2 initialement prévu.

Dans Hell's Kitchen, arrondissement populaire et malfamé de Manhattan à New York, cohabitent difficilement la mafia italienne implantée de longue date et la mafia irlandaise qui cherche à étendre son influence par des méthodes exclues des codes habituels. Revient dans le quartier Terry Noonan (Sean Penn), disparu depuis dix ans. Il va renouer avec la fratrie Flannery. Jackie (Gary Oldman), son  ami d'enfance, Kathleen (Robin Wright), son ex-fiancée, et Frankie (Ed Harris), le grand frère devenu le chef du gang local. Si les anciens réflexes se remettent progressivement en place, il subsiste en arrière-plan un doute sur les raisons du départ de Terry, sur sa longue absence sans donner de nouvelles et sur son retour inexpliqué.

À partir de ce canevas de départ, le scénario écrit par Dennis McIntyre scrute l'évolution des rapports entre les personnages à travers une guerre des gangs sans merci où la violence est omniprésente. Comme le dit Phil Joanou lui-même, c'est principalement l'esthétique du film qui en fait tout son prix, additionnée à une direction d'acteurs qui tire tout le parti d'un casting haut de gamme bénéficiant de personnalités très fortes toutes à l'orée d'une grande carrière. Le New York populaire et crasse des années 1990, juste avant sa définitive gentrification déjà en marche, est bien sûr magnifiquement filmé, tout comme la musique d'Ennio Morricone, sortant de ses jalons habituels, nimbe d'un refrain envoûtant ce ballet mortifère où la trahison est à chaque coin de rue.

Sean Penn, dans un rôle ambigu, a été puisé avec bonheur son inspiration chez le Brando de "Sur les quais" d'Elia Kazan (1954). Quant à Gary Oldman, ni dieu ni maître à ses côtés, seulement son jeu unique.

Un seul film marquant dans la carrière de Phil Joanou, on l'a dit. Mais quel film !

Critique extraite du Guide des films de Jean Tulard

Un film d'une grande violence (notamment dans le règlement de comptes final) et d'une incontestable authenticité. L'image est splendide et le scénario jouant sur l'ambiguïté des personnages sait retenir jusqu'au bout l'attention du spectateur. Ed Harris en chef de gang glacé et impitoyable est remarquable.