titre original | "Klute" |
année de production | 1971 |
réalisation | Alan J. Pakula |
photographie | Gordon Willis |
musique | Michael Small |
interprétation | Jane Fonda, Donald Sutherland, Roy Scheider |
récompense | Oscar de la meilleure actrice pour Jane Fonda |
La critique de Didier Koch pour Plans Américains
À l'orée des années 70, Jane Fonda est le porte-étendard de la libération féminine outre-Atlantique, affirmant clairement ses positions démocrates et contre la guerre au Vietnam qui est en train de devenir un bourbier dans lequel s'enlise le Président Nixon. Elle occupe par ailleurs une place centrale à Hollywood où elle n'a pas tourné depuis "On achève bien les chevaux" (1969) de Sydney Pollack. Le rôle de Bree Daniels, la prostituée de "Klute", qui lui rapportera son premier Oscar, ne pouvait pas lui échapper.
Alan J. Pakula, producteur des films de Robert Mulligan encore débutant comme réalisateur, la dirige dans ce thriller sulfureux, qui entend conjuguer suspense haletant et portrait intimiste d'une jeune femme de la middle class se prostituant pour garder le contrôle total sur sa vie aussi bien financièrement que physiquement et émotionnellement. Une démarche personnelle qui ne pouvait que séduire la fille d'Henry Fonda, qui aura dû âprement lutter au sein du clan familial pour trouver sa voie.
La menace d'un client psychopathe et l'immersion du détective Klute (Donald Sutherland) dans son quotidien vont venir bouleverser un équilibre déjà instable comme le prouve les séances de Bree chez sa psychanalyste, où elle tente de résoudre les contradictions où la mène sa frénésie de contrôle de soi. Habilement et comme rarement cela a été fait avant, Pakula parvient à doser ce mélange sans jamais qu'aucun des deux aspects du film ne viennent phagocyter l'autre.
Fatalement, comme le dira lui-même Pakula, au nom de cet équilibre, c'est le personnage de Klute qui sera un peu sacrifié, n'existant qu'en contre-jour de sa relation avec Bree Daniels. Donald Sutherland, flegmatique comme les meilleurs détectives du film noir, l'humour en moins, se tire à merveille de ce rôle difficile à faire exister.
Mais c'est dans l'approche formelle, aidé de Gordon Willis à la photographie et de Michael Small à la musique, que Pakula innove le plus, parvenant à rendre palpable et inquiétante la présence sourde d'un tueur dont on a pourtant très rapidement deviné l'identité.
Quelques scènes de déambulation de Bree dans le New York underground paraissent aujourd'hui un peu datées ou surfaites, mais l'ensemble supporte largement le poids des ans. Un film qui marquait d'un sceau prometteur la carrière d'un réalisateur assez peu prolifique (16 films en 30 ans de carrière), souvent efficace et trop tôt disparu.
Anecdote cocasse, Sylvester Stallone fait partie des danseurs lors de la scène où Bree Daniels tente d'éponger sa détresse dans une boîte de nuit.
Photos du tournage de "Klute"
Le générique de "Klute" conçu par Arthur Eckstein
La critique de Bertrand Mathieux