Un remake banal et peu crédible (au générique fabuleux)
titre original | "Cape Fear" |
année de production | 1991 |
réalisation | Martin Scorsese |
photographie | Freddie Francis |
musique | Elmer Bernstein et Bernard Herrmann |
montage | Thelma Schoonmaker |
production | Barbara De Fina |
interprétation | Robert De Niro, Nick Nolte, Jessica Lange, Juliette Lewis, Joe Don Baker, Robert Mitchum, Gregory Peck, Martin Balsam |
version précédente | "Les Nerfs à vif" de J. Lee Thompson, 1962, États-Unis |
La critique de Mathilde
Dans ce remake du thriller de J. Lee Thompson, dans lequel Robert De Niro reprend le rôle de Robert Mitchum et Nick Nolte, celui de Gregory Peck, point de sobriété, beaucoup de surenchère : les effets "terrifiants" sont gonflés jusqu'au grotesque, De Niro cabotine à mort, la fin est ridicule, voire grand-guignolesque (et interminable, de surcroît).
Restent Jessica Lange, toujours aussi belle que d'habitude, et Juliette Lewis, étonnante (nomination à l'Oscar de la meilleure actrice dans un second rôle).
En résumé : le film promet d'abord beaucoup (cf. le générique en particulier) ; puis il déçoit, mais maintient en éveil ; et pour terminer, il tape sur les nerfs, De Niro n'en finissant plus de disparaître de l'écran.
J'en déconseille donc la vision un dimanche soir : l'énervement procuré pourrait bien gâcher vos dernières heures de week-end.
La critique de Didier Koch pour Plans Américains
Martin Scorsese jusqu'alors étiqueté comme un réalisateur 'intellectuel', se laisse tenter par le remake d'un film de série B devenu culte. Il choisit de reprendre, en l'actualisant, un film noir de J. Lee Thompson datant de 1962 avec Gregory Peck et Robert Mitchum. Ce n'est rien de dire que Scorsese va durcir le rythme lancinant à dessein de l'original. C'est en réalité Robert De Niro qui a amené Scorsese sur le projet, profitant de l'occasion pour camper un personnage diabolique souvent à limite de la grandiloquence. Cette propension à forcer le trait permet au réalisateur de faire glisser progressivement son film du noir au thriller jusqu'à l'horreur dans un final largement inspiré des slashers des années 80 où le tueur en série renaissait en permanence de ses cendres.
Les deux compères s'amusent à rendre des hommages appuyés à Hitchcock, mais plus encore à Brian De Palma, cofondateur du Nouvel Hollywood avec Steven Spielberg et George Lucas. Robert Mitchum et Gregory Peck, les vétérans, sont appelés en renfort pour bien marquer la volonté de Scorcese de se livrer à un exercice de style. Au passage, Marty n'oublie pas de célébrer Charles Laughton dans une parodie du fameux dyptique "Love and Hate" gravé sur les phalanges du prêtre sadique joué par Robert Mitchum dans "La Nuit du chasseur" (1955), en transportant l'inscription sur les avant-bras du corps bodybuildé et entièrement tatoué de De Niro. Pour bien marquer la parenté de son film avec les classiques de l'épouvante, Scorsese convoque à la photographie le réalisateur vétéran de la Hammer, Freddie Francis.
Toute cette débauche d'effets amène le film à la limite de la boursouflure, ce qui sera beaucoup reproché à Scorsese lors de la sortie du film, aussitôt considéré comme l'une de ses œuvres mineures. Cette critique est sans doute justifiée, mais 20 ans après, le film a pris une patine qui modère l'opinion sans doute sévère de la critique de l'époque. Il est vrai que depuis, Scorsese a montré qu'il pouvait faire des concessions bien plus grandes au box-office. Ce film peut être vu comme une rupture dans la carrière du cinéaste et marquer le point de départ d'un déclin qui sera nettement affirmé par la collaboration avec DiCaprio à l'orée des années 2000. À chacun de se déterminer.
Martin Scorsese, un réalisateur fidèle
"Les Nerfs à vif" constitue sa 9e collaboration avec la monteuse Thelma Schoonmaker, sa 5e avec son ex-femme et productrice Barbara De Fina et sa 7e avec l'acteur Robert De Niro. Il s'agit de sa première collaboration avec le compositeur Elmer Bernstein.
Le logo Universal détourné pour "Les Nerfs à vif"
Après la classique apparition du logo Universal tournant autour de la planète Terre, l'ensemble des images passe au bleu et les lettres commencent à onduler légèrement. Un effet de vague, comme si nous regardions dans l'eau, se met en place et rappelle ainsi une des dernières scènes du film, particulièrement mouvementée dans les eaux vives d'une rivière.
Le générique des "Nerfs à vif" conçu par Saul Bass
La critique de Bertrand Mathieux