Colocation fatale
titre original | "Single White Female" |
année de production | 1992 |
réalisation | Barbet Schroeder |
scénario | Don Roos, d'après le roman "SWF Seeks Same" de John Lutz (1990) |
photographie | Luciano Tovoli |
musique | Howard Shore |
interprétation | Bridget Fonda, Jennifer Jason Leigh, Steven Weber, Peter Friedman |
Critique extraite du Guide des films de Jean Tulard
À chaque nouveau film qu'il tourne aux États-Unis, Barbet Schroeder semble perdre un peu plus de son esprit critique et de son indépendance vis-à-vis de la société américaine qu'il avait pourtant très bien cernée au départ ("Barfly"). Ici, en dépit d'une construction très efficace, mais archi-classique, on peut surtout déplorer une fin qui répond à tous les poncifs du genre : plusieurs fausses fins, escalade dans le sanglant... le thriller psychologique est à la mode en ce début des années 1990, soit, mais pourquoi faut-il qu'un réalisateur doté d'un regard quasi-ethnologique ("Koko, le gorille qui parle", "General Idi Amin Dada : autoportrait") et d'un sens du romantisme dans ce qu'il a de plus tragique ("More", "Tricheurs"), doive s'y adonner de manière si peu innovatrice ?
La critique de Didier Koch pour Plans Américains
"J.F. partagerait appartement" se situe dans la période américaine de Barbet Schroeder. Le réalisateur suisse, arrivé à Hollywood en 1986 pour y tourner "Barfly" qui lui tenait à cœur en tant qu’admirateur de l’œuvre de Charles Bukowski, connaît le succès critique et commercial en 1990 avec "Le Mystère von Bülow", suspense judiciaire tiré de l’histoire vraie du milliardaire Claus von Bülow.
Le film néo-noir étant alors en vogue, il enchaîne avec "J.F. partagerait appartement", adaptation du roman de John Lutz paru en 1990. Le colossal succès de "Liaison fatale" (1987) d’Adrian Lyne est encore dans toutes les têtes, et notamment dans celles des producteurs, qui pensent avoir trouvé le filon du succès garanti à travers l’exposition crue des dérèglements de la psyché féminine. En 1990, Rob Reiner réalisera "Misery" avec Kathy Bates (oscarisée pour le rôle en 1991), d'après le roman de Stephen King. Encore en 1992, Curtis Hanson proposera "La Main sur le berceau" avec Rebecca de Mornay. Barbet Schroeder est donc en bonne compagnie.
Après l’érotomanie de Glenn Close, l’idolâtrie furieuse de Kathy Bates et le désir obsessionnel de maternité de Rebecca de Mornay, la toujours excellente Jennifer Jason Leigh s’affronte à la culpabilité de Hedy Carlson, déstructurée à jamais par la mort accidentelle de sa sœur jumelle. Le besoin d’identification maladif de la jeune femme croise la route de la très belle Allison Jones, interprétée par Bridget Fonda, la fille de Peter Fonda, qui sera la parfaite victime consentante des attentions appuyées de sa nouvelle colocataire.
À partir de ce canevas, Barbet Schroeder déroule avec professionnalisme tous les ingrédients propres à faire monter l’angoisse et le suspense d’une intrigue dont on comprend malgré tout assez vite les tenants et les aboutissants. L’image léchée de Milena Caronero met parfaitement en valeur la sensualité évanescente qui émane de la très gracile Bridget Fonda, opposée au regard farouche et obstiné d’une Jennifer Jason Leigh qui donne toute sa tension à un film qui, sans génie, remplit parfaitement son cahier des charges.
La critique de Bertrand Mathieux