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"Hardcore"

Hardcore - affiche

titre original "Hardcore"
année de production 1979
réalisation Paul Schrader
scénario Paul Schrader
photographie Michael Chapman
musique Jack Nitzsche
interprétation George C. Scott, Peter Boyle, Season Hubley

Le meilleur film de Paul Schrader ! (la critique de Pierre)

Paul Schrader, c'est le scénariste de "Taxi Driver", devenu ensuite un réalisateur très inégal, pour le meilleur ("Mishima") et pour le pire ("Étrange séduction"). "Hardcore" est son deuxième film.

Le pitch : Jake VanDorn (George C. Scott) est un industriel, membre éminent d'une petite communauté protestante. Sa fille fugue et tombe dans le milieu du porno... VanDorn va s'infiltrer dans ce milieu louche pour la retrouver...

On retrouve toutes les obsessions de Schrader là-dedans : la morale protestante, l'attirance coupable pour le monde des putes et du cul (symbolisé, comme dans "Taxi Driver", par une jeune prostituée débile mais sympathique).

Scott est PARFAIT dans le rôle de VanDorn : c'est bien évidemment sur lui que tout repose, il est excellent, la qualité du film en est immédiatement grandie.

Le film joue sur le voyeurisme du spectateur, avec talent. On a évidemment envie "de voir" et de voir jusqu'où tout ça nous emmène. C'est un peu comme dans "8mm", la merde avec Nicolas Cage, mais fin 70's et bien mieux fait. Il y a même un passage un peu "comédie" qui rappelle "Body Double" (Schrader a été le scénariste d'"Obsession" du même Brian De Palma). Et la fin est émouvante.

Seul vrai défaut : ça met un bon moment à démarrer (on a compris qu'il y a du cul là-dedans, alors, à force de voir la communauté protestante pendant 20 minutes, on commence à s'impatienter : quand est-ce qu'on voit des putes, nom d'un chien ???!!!???).

Bon film.

Critique extraite du Guide des films de Jean Tulard

Le film où Schrader exprime le mieux sa philosophie. Nous sommes perpétuellement en ballottage d'un extrême à l'autre, dans ce cas, le puritanisme et la pornographie, faces différentes de la même pièce, et nous ne savons que nous réfugier dans l'une quand l'autre nous oppresse par trop, sans jamais réussir à trouver la voie royale de la sagesse. Merveilleuse interprétation de Season Hubley dans le rôle d'une prostituée.

La critique de Didier Koch pour Plans Américains

Dans la foulée de son chef-d'œuvre "Blue Collar", Paul Schrader le rigoriste décadent s'attèle à "Hardcore", qui peut être vu comme une sorte de "film gomme" ou de "film avant le film". Paul Schrader, qui a écrit le scénario de "Taxi Driver", pourrait avoir choisi de réécrire l'histoire sordide d'Iris Steensma (Jodie Foster) dont le père, fervent protestant calviniste d'une bourgade du Michigan (Grand Rapids), serait parti à sa recherche pour l'arracher à l'enfer de la prostitution avant qu'elle ne rencontre Travis Bickle (Robert De Niro), son chevalier blanc. Ainsi, "Hardcore" effacerait le bain de sang qui concluait "Taxi Driver". Si l'on songe que Paul Schrader est né à Grand Rapids et que lui aussi est d'obédience calviniste, on peut imaginer que c'est lui-même qui, fautif d'avoir livré de sa plume la jeune Jodie Foster à la débauche, et se transposant à l'écran en la personne de George C. Scott, va rechercher son héroïne dans un geste expiatoire.

S'il cherche peut-être dans "Hardcore" une forme de rédemption à son goût immodéré pour la mise en scène de la débauche et de la violence stylisée, Schrader n'en oublie pas pour autant de dresser un portrait saisissant et réaliste du monde de l'industrie de la pornographie alors en pleine extension sur la côte Ouest des États-Unis. Éternelle dualité de l'écriture chez Schrader. À la recherche d'une image sale et suffocante, il s'est adjoint les services de Michael Chapman, le chef-opérateur de "Taxi Driver".

L'immense George C. Scott, trop heureux d'enfin retrouver un rôle à sa mesure depuis la période de vaches maigres qui avait bizarrement suivi son imposante prestation dans "Patton", joue ce père un peu raide qui va devoir faire l'apprentissage accéléré de la violence urbaine pour accomplir son devoir et récupérer sa progéniture. Quelle ne sera pas sa surprise de découvrir que cette descente aux enfers est le fruit d'une éducation religieuse qui, voulant nier la liberté de conscience et la réalité des sens, conduit certaines de ses ouailles vers une dérive libératrice souvent suicidaire. C'est alors la place de la jeune Kristen Van Dorn (Ilah Davis) que prend Paul Schrader, qui avait connu les pires tourments sensoriels durant l'écriture du scénario de "Taxi Driver" (il visionnait en boucle, en cachette de sa femme, des films pornographiques et avait développé une fascination morbide pour les armes à feu).

"Hardcore", porté par les larges épaules de George C. Scott et fort bien rythmé par la musique de Jack Nitzsche (déjà présent sur "Blue Collar"), est le film qui reflète le mieux la personnalité ambiguë et souvent controversée de Paul Schrader. Moins abouti que "Blue Collar", il n'en demeure pas moins un film coup de poing et sans fioritures (le tape à l'œil étant parfois le péché mignon de Schrader) qui vous prend aux tripes.

Présentation de "Hardcore" par Jean-Baptiste Thoret au Centre des arts d'Enghien-les-Bains
dans le cadre du cycle "Autour de John Ford" en 2015-2016

Bande-annonce modernisée de "Hardcore" © Dan McBride

Lieux de tournage de "Hardcore" © Jesse Nickell
Los Angeles, San Diego et San Francisco, Californie - 1978 vs 2019

Hardcore - affiche

Hardcore - générique