titre original | "At Close Range" |
année de production | 1986 |
réalisation | James Foley |
scénario | Nicholas Kazan |
photographie | Juan Ruiz Anchía |
interprétation | Sean Penn, Christopher Walken, Mary Stuart Masterson, Chris Penn, David Strathairn, Kiefer Sutherland, Crispin Glover |
Critique extraite du Guide des films de Jean Tulard
Du punch et un scénario adroitement ficelé pour un film noir bien interprété et qui pousse à une réflexion sur la banalisation du crime.
La critique de Didier Koch pour Plans Américains
"Comme un chien enragé" est aujourd’hui paré du statut de film culte, faisant preuve d’une noirceur peu courante au sein de la décennie 1980 où l’esthétique « clippesque » importée à Hollywood par les réalisateurs anglais et le buddy movie constituaient la règle d’or pour le succès dans le genre policier. Et de fait, le film de James Foley ne fera pas un tabac au box-office, loin s’en faut.
Basé un sur fait divers réel survenu en 1978 dans la banlieue de Philadelphie (Pennsylvanie), qui avait vu un chef de gang local abattre froidement des adolescents précédemment recrutés par crainte de leur témoignage, "Comme un chien enragé" prend le parti en romançant l’intrigue de s’interroger sur l’atavisme familial conjointement au déterminisme social. James Foley et son scénariste Nicholas Kazan (le fils d’Elia Kazan) ont en effet décidé que deux des adolescents (Sean et Chris Penn) seront les fils du chef de gang Brad Sr. (Christopher Walken), réapparu brutalement dans la vie des deux jeunes hommes en quête d’identité pour à jamais chambouler leur vie une seconde fois.
Pour Sean Penn et Christopher Walken, le film marquera une étape importante dans leurs carrières respectives. Sean Penn encore débutant impose ici ce qui sera sa marque pour le reste de sa carrière, les rôles, le bad boy qu’ils soient flics ou voyous, toujours aux frontières du statut initial qui est le leur. Quant à Christopher Walken qui est déjà une grosse vedette à la suite de l’oscar du second rôle reçu pour sa prestation de GI suicidaire dans "Voyage au bout de l’enfer" (Michael Cimino en 1978), James Foley utilise à merveille son physique si particulier entre ange et démon qui sera dès lors repris pour de nombreux rôles marquants, principaux ou secondaires, comme chez Abel Ferrara ("The King of New York" en 1990, "The Addiction" en 1995, "Nos funérailles" en 1996), ou Tony Scott ("True Romance" en 1993). Par voie de conséquence, leur affrontement phagocyte tout le film à travers un jeu d’attraction/répulsion qui s’avérera toxique puis tragique pour tout ceux qui les entourent.
L’intrigue elle-même plutôt relâchée s’enroule autour de cette réconciliation impossible dont le spectateur pressent qu’elle ne peut être frappée que du sceau de malheur. Aidé de son chef-opérateur espagnol, Juan Ruiz Anchia, tout juste remarqué pour sa participation au "Maria’s Lover" d’Andrei Konchalovski, James Taylor mise essentiellement sur l’atmosphère visuelle pour rendre compte des enjeux qui lui tiennent à cœur. Notamment le contraste entre l’aspect romantique de la relation entre Brad Jr (Sean Penn) et Terry (Mary Stuart Materson) avec les promesses d’avenir radieux qu’elle charrie et le tropisme familial qui ramène presque à tous coups Brad Jr. vers sa bande et son paternel, illusion d’une vie facile en dehors de toute contrainte. Les deux acteurs sont à leur meilleur, même si Sean Penn cherche encore à poser son jeu qui pâtit encore d’effets trop appuyés pour porter sur leurs solides épaules cette sorte de tragédie grecque sur fond d’Amérique profonde désenchantée, pas complétement aboutie.