| titre original | "Mystic River" |
| année de production | 2003 |
| réalisation | Clint Eastwood |
| scénario | Brian Helgeland, d'après le roman éponyme de Dennis Lehane |
| photographie | Tom Stern |
| montage | Joel Cox |
| musique | Clint Eastwood |
| interprétation | Sean Penn, Tim Robbins, Kevin Bacon, Laurence Fishburne, Marcia Gay Harden, Laura Linney, Spencer Treat Clark, Eli Wallach (non crédité) |
| récompenses | • Oscar du meilleur acteur pour Sean Penn |
| • Oscar du meilleur acteur dans un second rôle pour Tim Robbins | |
| • César du meilleur film étranger en 2004 |
La critique de Didier Koch pour Plans Américains
"Mystic River" est le 24e film réalisé par Clint Eastwood et le quatrième où il n’apparaît pas au générique après "Breezy", "Bird" et "Minuit dans le jardin du bien et du mal". Tous des films très personnels où l’acteur-réalisateur a pris une part de risque qui n’a jamais été récompensée (trois des très rares échecs financiers de sa carrière). "Mystic River", inspiré du roman éponyme de Dennis Lehane, écrivain natif de Boston, va rafler la mise aussi bien critique que financière, contribuant à asseoir définitivement la réputation de réalisateur d’Eastwood, qui enchaînera avec un quasi sans faute au box-office pour les quinze films qui vont suivre jusqu’en 2021.
Le roman de Dennis Lehane adapté par Brian Helgeland suit les destins liés, distendus, puis à nouveau joints 25 ans plus tard, de trois camarades d’enfance ayant grandi dans les rues de Boston. Un jour de 1975, les trois mioches décident d’inscrire leurs prénoms sur une plaque de ciment toute fraîche pour laisser une trace de leur amitié, mais aussi comme pour commencer à affirmer leurs individualités propres. Mais l'un d'eux n’a pas le temps d’inscrire entièrement son prénom que deux hommes se présentant comme des agents de police l’embarque pour ce qui sera en réalité un calvaire de quatre jours, concocté par deux pédophiles. La fuite miraculeuse du jeune garçon achèvera une entame de film qui se solde par un nom à moitié écrit sur du ciment et des rideaux qui se referment sur un futur compromis. Vingt-cinq ans plus tard, le destin frappe à nouveau et va réunir Jimmy (Sean Penn), Dave (Tim Robbins) et Sean (Kevin Bacon) pour leur demander de régler définitivement une tragédie laissée en suspens. Les trois enfants arrachés brutalement à leur innocence devenus des hommes se sont construits chacun avec les armes qui étaient les siennes. La fille de Jimmy retrouvée assassinée, chacun va devoir se confronter à la personnalité des deux autres.
Empruntant une partie des ressorts de la tragédie grecque, le roman paru en 2001 a immédiatement séduit Clint Eastwood, qui a eu la lumineuse idée de réunir Kevin Bacon, Sean Penn et Tim Robbins pour être les principaux acteurs de ce film profondément noir, montrant comment le malheur sait s’y prendre pour rattraper ceux qu’il s’est choisis, de préférence dans certains quartiers des grandes mégalopoles. L’intrigue est certes fortement improbable, mais aussi très propice aux scènes à forte densité dramatique, qu’Eastwood derrière sa caméra et l’ensemble de ses acteurs servent au mieux. Le public ne s’y est pas trompé, qui est venu en masse, et l’académie des Oscars non plus, qui a récompensé Sean Penn et Tim Robbins.
Un film très prenant et émouvant, même si son intrigue peut sembler un peu trop calibrée au détriment du réalisme dans le but de susciter, parfois un peu trop complaisamment, les émotions recherchées.
On notera enfin la présence courte, mais toujours succulente du vétéran Eli Wallach.
