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"Zombie"

Le crépuscule des morts-vivants

Zombie - affiche

titre original "Dawn of the Dead"
année de production 1978
réalisation George A. Romero
scénario George A. Romero
montage George A. Romero (et Dario Argento pour la version recut)
photographie Michael Gornick
musique Dario Argento & les Goblins
effets spéciaux Tom Savini
interprétation David Emge, Ken Foree, Scott H. Reiniger, Gaylen Ross, Tom Savini
 
épisode précédent "La Nuit des morts-vivants" de George A. Romero, 1968
 
épisodes suivants • "Le Jour des morts-vivants" de George A. Romero, 1985
• "Land of the Dead - Le Territoire des morts" de George A. Romero, 2005
• "Diary of the Dead - Chroniques des morts-vivants" de George A. Romero, 2007
• "Survival of the Dead" de George A. Romero, 2009
 
remake "L'Armée des morts" de Zack Snyder, 2004

La critique de Pierre

Je vais vous expliquer pourquoi "Zombie", le vrai, celui de 1978, est une perfection et un film essentiel. Ok ? C'est parti, suivez-moi.

"Zombie" : un film qui s'inscrit dans une riche tradition
"Zombie" n'est pas arrivé "comme ça". C'est un film qui, à l'évidence, doit beaucoup aux lectures de Romero enfant, à savoir les comic books d'horreur, qui lui inspireront plus tard un "Creepshow" en forme d'hommage. Les morts-vivants sont un des thèmes récurrents de "Tales from the crypt", le comic d'horreur le plus célèbre, qui utilisait déjà cette figure pour faire de petites fables morales. Les postures des héros rappellent à de nombreuses reprises cette influence de la BD.
"Zombie" joue aussi sur des thèmes éprouvés par la littérature et le cinéma avant lui : la peur de la mort, la paranoïa, la peur du corps (le sien, celui des autres), etc. (hyper intello, mon truc).
"Zombie" est également, bien sûr, l'enfant de la fameuse "Nuit des morts-vivants" du même Romero, qui date de 1968, dont il reprend les figures principales : un lieu clos, un groupe de personnages dont un héros noir, la menace dehors. Entre-temps, ces procédés sont devenus classiques et Romero en est conscient. Il n'en restera donc pas prisonnier.

"Zombie" : un film qui innove grave aussi
Ce qui est sûr, c'est qu'avant "Zombie", le public n'avait quasiment jamais vu un truc aussi sanglant. Il faut dire que Tom Savini, le maîîîître du maquillage cradingue, est aux commandes et que ça arrache.
Le film était d'ailleurs tellement sanglant que, pour éviter un X, ses producteurs ont préféré le sortir carrément sans classification (un cas quasiment unique) avec tous les problèmes de distribution que cela engendre. En cela, "Zombie" est une date dans la liberté d'expression à l'écran (je n'ai pas peur des mots aujourd'hui, moi).
Mais "Zombie" - c'est devenu un lieu commun que de le dire - est aussi une critique extrêmement violente des dérives de son époque : l'esprit guerrier (le Viêtnam), le consumérisme, les médias, toutes les formes d'exclusion (sexisme, racisme). Ça a l'air évident aujourd'hui, mais admettons que l'idée d'utiliser les zombies comme métaphore des clients débiles des supermarchés (nous), c'est une idée assez géniale.

"Zombie" : un film d'auteurs
Romero n'est pas considéré comme un des plus grands par la majorité de la critique, et c'est un tort. Qu'il me soit permis de mettre en exergue deux de ses talents, vraiment frappants, qui ne sont pas des moindres : le montage et la direction d'acteurs.
D'abord, Romero réussit, sans grands moyens ni mouvements de caméra délirants, à raconter son histoire à un rythme trépidant. L'intro du film, qui montre le chaos généralisé régnant dans un studio de télé, est absolument géniale. Le montage restitue parfaitement le bordel total de ce moment (ce n'est pas moi qui le dit, c'est Bertrand Tavernier). Les séquences d'action sont emmêlées entre elles de manière hallucinante, à faire pâlir d'envie "Creative Impulse" et ses montages alternés.
Quant aux acteurs, Romero réussit à rendre convaincants, émouvants, des comédiens pourtant non professionnels. Ken Foree, qui joue le héros du film, est vraiment formidable : tout à tour mystérieux, sympa, amical, effrayant, redoutable, il est inoubliable. Je le trouve particulièrement super dans cette scène à la fin, où il réfléchit pendant quelques précieuses secondes sur ses alternatives.
Mais là où ça devient marrant, c'est que "Zombie" n'a pas un auteur, mais deux. Romero a réalisé et monté la version du film destinée au public américain. En revanche, pour le reste du monde, le monteur et compositeur du film n'est autre que... Dario Argento !
C'est tout de même un cas assez unique dans l'histoire du cinéma. Et ça permet de comparer ce que deux visionnaires font du même film. Le résultat est identique et très différend à la fois. Pour moi, c'est clair, la version Argento est supérieure à tous les niveaux :
- les personnages deviennent beaucoup plus mystérieux ; de nombreuses scènes sont montrées sans leur résolution (par exemple, dans une scène d'engueulade, Argento "oublie" de montrer les personnages se réconcilier) ;
- le film fait 20 minutes de moins et devient bien meilleur ;
- une différence de taille : Argento ne montre pas la transformation d'un des personnages principaux, Roger ;
- la musique des Goblins et d'Argento est démentielle : là où Romero mettait tout le temps de la musique de merde de supermarché pour souligner sa critique du consumérisme, déjà évidente (effet très lourdingue), Argento nous colle un truc ringard mais génial, qui donne une ambiance de fin du monde imparable.
Merci, Dario !
Pour un dossier hyper complet sur les différences entre les deux versions : www.devildead.com.

"Zombie" : une référence
Il y aura bien sûr une suite à "Zombie", "Le jour des morts-vivants", non moins bon mais peut-être plus imparfait, qui mériterait un photomontage à lui tout seul.
Par ailleurs, le film, ayant deux auteurs, a eu deux types d'influences bien distinctes.
D'abord, une platrée de films de zombies italiens, dont les meilleurs sont signés Lucio Fulcio, qui réalisera un "Zombi 2" sans aucun rapport avec Romero.
Il y aura également les fameux démons, qui n'ont rien à voir avec les zombies mais tout de même un peu.
Et puis il y a l'influence sur le cinéma anglo-saxon, dont les exemples sont si récents et évidents que je ne les développerai même pas. *

Pour tout ça, merci à toi, George A. Romero.

* "Shaun of the dead", "28 jours plus tard"

Affiche britannique du film
Référence sur l'une des affiches du film à sketches "Creepshow",
également réalisé par George A. Romero
© Graham Humphreys

Zombie - affiche

© Last Exit to Nowhere

Zombie - générique

FilmsFantastiques.com, L'Encyclopédie du Cinéma Fantastique
La chronique de Gilles Penso