titre original | "The Naked Prey" |
année de production | 1965 |
réalisation | Cornel Wilde |
scénario | Clint Johnston et Don Peters |
photographie | H.A.R. Thomson |
musique | Edwin Astley, Andrew Tracey et Cornel Wilde (non crédités) |
production | Cornel Wilde |
interprétation | Cornel Wilde, Gert van den Bergh, Ken Gampu |
Critique extraite du Guide des films de Jean Tulard
Éblouissante chasse à l'homme, dans la lignée de "Zaroff" et du "Jugement des flèches". La photo est remarquable et Cornel Wilde excellent.
Extrait de la chronique no 21 du 1er octobre 2008 de Bertrand Tavernier
Criterion vient de sortir un film très rare que j’aime beaucoup, "The Naked Prey" ("La Proie nue"), produit, réalisé et joué par Cornel Wilde. Le scénario de Don Peters et Clint Johnston s’inspire de la manière dont John Colter, un membre de l’expédition de Lewis et Clark, parvint à échapper aux Indiens Pieds noirs après une poursuite dans la neige qui dura des semaines. Wilde transpose cet incident en Afrique voici deux siècles, en profite pour attaquer les trafiquants d’esclaves, l’arrogance des blancs et glisser de multiples notations écologiques. Une scène de tuerie d’éléphants frappe par la modernité du propos, son efficacité et en dix minutes règle son compte aux "Racines du ciel" de John Huston, cette honteuse trahison du roman de Romain Gary. Comme le note Michael Atkinson, « de toutes les stars devenues cinéastes et auteurs, Wilde est certainement le plus instinctif, le plus original ». Avant Clint Eastwood, ai-je envie d’ajouter. J’avais déjà vanté dans ce blog les étranges qualités de "Beach Red". "La Proie nue", tourné en Afrique, ne manque pas de puissance, et raconte avec une grande densité une chasse à l’homme d’où pratiquement tout dialogue est exclu, en dehors d’échanges non sous-titrés entre les guerriers africains. La force du propos, le respect avec lesquels sont filmés les indigènes jusque dans leur cruauté (dans leur douleur aussi, Wilde s’attardant sur ce qu’ils ressentent quand ils découvrent le corps d’un frère ou d’un ami) efface tout esprit paternaliste ou raciste. Dans cet avatar de "Zaroff", entièrement filmé en extérieurs (d’une variété, d’une beauté, d’une présence dramatique confondante), Wilde insère des plans d’animaux admirables (ce film bat tous les records dans le nombre et la variété des serpents) qui servent de contrepoint moral à l’action. En outre, il truffe son récit de trouvailles humoristiques (le héros affamé poursuit des bestioles qui s’échappent sans cesse), détruisant au passage bien des poncifs inhérents au genre, le film d’aventures africain… Les moments de violence sont traités avec une rapidité sèche, un usage constant de l’ellipse, du jump cut pour éviter les effets spéciaux, et on a l'impression que le film, comme le personnage, lutte pour sa survie… Cette réussite exceptionnelle et courageuse (aucun africain ne parle anglais) est magnifiquement photographiée en Scope et bénéficie d’un beau transfert. La bande sonore est entièrement constituée de chants et de percussions recueillis par Andrew Tracey.