Film noir très noir
titre original | "Angel Heart" |
année de production | 1987 |
réalisation | Alan Parker |
scénario | Alan Parker, d'après le roman "Le Sabbat dans Central Park" de William Hjortsberg |
photographie | Michael Seresin |
musique | Trevor Jones |
interprétation | Mickey Rourke, Robert De Niro, Charlotte Rampling, Lisa Bonet |
Critique extraite du Guide des films de Jean Tulard
Faust en film noir : un univers glauque, inquiétant, outré ; des meurtres à la pelle et surtout le fabuleux duo Rourke-De Niro. Le meilleur film de Parker et l'un des sommets du film noir.
La critique de Didier Koch pour Plans Américains
Avec "Angel Heart", Alan Parker, metteur en scène anglais venu de la publicité tout comme les frères Scott ou Hugh Hudson, s’attaque au film noir à la sauce vaudou en chevauchant hardiment le thème de Faust de nombreuses fois utilisé dans l’histoire du cinéma. Il adapte "Fallen Angel", un livre de William Hjorstberg paru en 1978, dont l’accroche figurant sur la couverture mentionne : « Quand Chandler rencontre l’Exorciste ». En 1985, alors au sommet de sa popularité, il est contacté par le producteur Elliott Kastner, qui lui donne carte blanche pour l’écriture du scénario. Alan Parker expliquera qu’il s’est très largement éloigné du récit de William Hjorstberg. Ce qui n’est pas étonnant quand on sait que son cinéma répond à des exigences visuelles qui conditionnent en partie l’intrigue.
Harry Angel, un privé incarné par Mickey Rourke, est contacté par un dénommé Louis Cyphre, pour lequel Robert De Niro livre une stupéfiante interprétation, remplie d’un raffinement maniéré, où les cheveux longs tirés en arrière et soigneusement retenus par un catogan en remontrent aux ongles longs et à la canne à pommeau roulant dans le creux de la main. Sans parler de l’œuf dur délicatement écaillé après avoir été roulé sur l’accoudoir du siège où Louis Cyphre est majestueusement assis. Il est demandé au détective interloqué de partir à la recherche d’un certain Johnny Favorite, crooner à la gloire envolée ayant séjourné en hôpital psychiatrique.
Mickey Rourke, lui aussi au sommet de sa gloire, est ici la nouvelle incarnation revue et corrigée des Philip Marlowe, Tony Rome ou Lew Harper. Il est, comme il se doit, le privé miteux englué dans des petites affaires tout juste bonnes à payer le loyer quand débarque une enquête à priori trop grosse pour lui.
Incontestablement, Alan Parker a bien retenu tous les ingrédients et dogmes du film noir des années 1940. Mais il a décidé de les pousser à leur paroxysme à travers cette histoire empreinte des rites vaudou, afin de tirer tout le parti esthétique d’un genre tombé en désuétude après quinze ans de gloire. Certains critiqueront à l’époque de sa sortie cet exercice de style assumé, qui se déploie dans tous ses excès (bleus et rouges saturés, angles expressionnistes, grilles d’ascenseurs ou pales de ventilateurs prémonitoires…), un peu au détriment d’une intrigue pourtant captivante qui se relâche à cause d’une caméra trop occupée à faire briller les somptueux décors qui entourent le héros.
Si on ne peut hisser le film au niveau des meilleurs Fritz Lang, Billy Wilder, Otto Preminger ou Robert Siodmak, on doit lui reconnaître quand même bien du charme. Quoi qu’il en soit, plus de trente ans après sa sortie en salles, "Angel Heart" fascine toujours autant par ses partis pris esthétiques (visuels et sonores). C’est sans aucun doute ce que voulait Alan Parker tout récemment décédé.
Extrait de la chronique de Bertrand Tavernier du 7 janvier 2015
"Angel Heart" est peut être le chef-d’œuvre d’Alan Parker. Une nouvelle vision prouve non seulement que le film tient remarquablement le coup (les affrontements entre Mickey Rourke, bluffant, et De Niro sont toujours aussi spectaculaires) mais qu’il se bonifie et que beaucoup de réalisateurs de films d’horreur pourraient en prendre de la graine. L’atmosphère de La Nouvelle-Orléans, la présence vaudou, sont formidablement rendues : une poursuite à pied dans les ruelles se révèle beaucoup plus intéressante que la plupart des scènes similaires en automobile.
La chronique de Gilles Penso
La critique de Bertrand Mathieux