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"Abraham Lincoln"

Raymond Massey is Abraham Lincoln

Abraham Lincoln - affiche

titre original "Abe Lincoln in Illinois"
année de production 1940
réalisation John Cromwell
scénario Robert E. Sherwood, d'après sa propre pièce (1938)
photographie James Wong Howe
musique Roy Webb
production Max Gordon
interprétation Raymond Massey, Gene Lockhart, Ruth Gordon, Mary Howard, Minor Watson, Alan Baxter, Harvey Stephens, Howard Da Silva

Extrait de la chronique du 3 septembre 2010 de Bertrand Tavernier

Cela faisait très longtemps que je voulais revoir "Abraham Lincoln" de John Cromwell, écrit par Robert Sherwood d'après sa pièce qui remporta un grand succès en 1938. C'est en quelque sorte une suite du chef-d'œuvre de John Ford (dont il recoupe certaines scènes sous un autre angle), "Vers sa destinée" qui commence par une après-midi pluvieuse de 1831, lorsque Lincoln âgé de 22 ans (Massey fait là trop vieux pour le rôle) quitte la maison familiale. Le film va raconter les 30 années qui suivent, jusqu'au voyage en train de 1860 qui l'emmène à Washington où, contre toute attente, il remportera les élections… Raymond Massey, que beaucoup considèrent comme la plus juste incarnation de Lincoln, sera nommé aux Oscars pour ce rôle.
Comme dans le Ford, son histoire d'amour avec Ann Rutledge tourne court car elle meurt subitement de maladie et Lincoln, redevenu avocat, va rencontrer et épouser Mary Todd que joue magnifiquement Ruth Gordon.
Le film de Cromwell qui abonde en extérieurs filmés avec une certaine ampleur, frappe surtout par son refus de toute l'imagerie traditionnelle, voire par sa noirceur. Lincoln est montré comme un personnage souvent velléitaire, parfois opportuniste, hésitant, refusant au début de s'engager à fond contre l'esclavage bien qu'il le réprouve. C'est sa femme qui le pousse, l'oblige à prendre les grandes décisions. Il ne veut pas se porter candidat et elle doit le lui arracher tout en sachant que l'Histoire ne retiendra d'elle que l'image d'une femme revêche et effacée.
C'est une œuvre en creux, qui suggère, aborde de manière oblique, les conflits qui vont ravager le pays. Aucune narration épique, mais un ton discret, austère, toujours en demi-teinte que je trouve relativement attachant. C’est un complément indispensable au Ford.