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"Mary Reilly"

Mary Reilly - affiche

titre original "Mary Reilly"
année de production 1996
réalisation Stephen Frears
scénario Christopher Hampton, d'après le roman de Valerie Martin
photographie Philippe Rousselot
musique George Fenton
interprétation Julia Roberts, John Malkovich, Glenn Close, Michael Gambon, Michael Sheen, Ciarán Hinds

La critique de Sébastien Miguel pour Plans Américains

Murailles aux pierres grises, brouillard persistant, silhouettes fantomatiques et cris de terreur dans le lointain : "Mary Reilly" évolue dans les profondeurs aqueuses de l’inconscient. Un univers mental n’empruntant presque plus rien au Londres sordide de la révolution industrielle.

Le film a ses imperfections (la mère morte dans une armoire, l’ultime transformation totalement ratée), mais la volonté de Stephen Frears est si flagrante, la beauté de la production si grande qu’on ne peut que s’incliner devant tant d’audaces.

Le scénario de Christopher Hampton multiplie les références psychanalytiques (scènes oniriques, ressemblances entre Hyde et le père de l’héroïne…) sans jamais alourdir l’entreprise. Superbe direction artistique de Stuart Craig ("Les Liaisons dangereuses", "Elephant Man", "Gandhi") et magnifique photo de Philippe Rousselot, qui éclaire avec douceur le visage de Julia Roberts et écrase les scènes d’horreurs d’une lumière agressive, crue.

Totalement désacralisée, Julia Roberts est toute en sobriété face à un John Malkovich qui trouve (pour la deuxième fois grâce à Frears) l’un des seuls grands rôles de sa carrière.

Film à la sensibilité toute ‘européenne’, hiératique et froid, "Mary Reilly" n’est peut-être pas une entière réussite, mais c’est assurément un très beau film.

La critique de Didier Koch pour Plans Américains

Stephen Frears est arrivé sur "Mary Reilly" après que Roman Polanski, initialement prévu, soit écarté, puis que Tim Burton, pressenti par la Tri Star Company, se soit retiré du projet suite à un désaccord avec le studio au sujet du traitement réservé à "Ed Wood". Daniel Day-Lewis et Uma Thurman, qui devaient occuper les deux rôles principaux, sont remplacés par John Malkovich, que Frears connaît bien pour l’avoir dirigé dans "Les Liaisons dangereuses" en 1988, et Julia Roberts, alors au sommet de sa gloire.

Cette variation innovante et fort subtile autour de "L’Étrange Cas du docteur Jekyll et de M. Hyde", le célèbre roman de Robert Louis Stevenson (paru en 1886), est écrite par Christopher Hampton, le scénariste des "Liaisons dangereuses", à partir du roman éponyme de Valerie Martin. Deux films très brillants ayant été réalisés en 1931 et 1941 par Rouben Mamoulian et Victor Fleming, il était plutôt bienvenu, et a priori moins risqué, d’aborder le sujet par une autre voie.

Le docteur Jekyll (John Malkovich), qui a déjà éprouvé sur lui-même sa diabolique formule visant à séparer en l’homme sa face sociale de sa face animale, cherche à préserver son secret au sein de sa propre demeure. Une jeune servante, Mary Reilly (Julia Roberts), est recrutée. Progressivement, la sensibilité de la jeune femme au passé affectif douloureux intrigue le docteur, qui jongle douloureusement avec les méfaits imprévisibles et dévastateurs de sa découverte. Elle devient sa confidente. Les sentiments se font plus troubles et tortueux avec la présence de plus en plus prégnante de M. Hyde, qui assume les pulsions sexuelles que le gentil docteur se refuse de concrétiser quand il découvre les graves blessures intimes de Mary Reilly.

Magnifiquement filmée par Stephen Frears, aidé de son chef-opérateur Philippe Rousselot déjà présent lui aussi sur "Les Liaisons dangereuses", Julia Roberts, au visage de Piéta, livre l’une de ses plus belles interprétations, parvenant parfaitement à exprimer l’extrême fragilité de cette jeune femme brisée par la vie, cherchant malgré tout à s’affirmer. L’intrigue parfaitement fluide reprend, sans les trahir, tous les thèmes évoqués dans le roman de Louis Stevenson. Stephen Frears, alors dans sa période américaine, démontre ici qu’il est un réalisateur accompli, capable d'affirmer un point de vue derrière sa caméra. Ici, un magnifique portrait de femme.

On remarquera l’apparition très furtive de Willem Dafoe, que l’on reconnaît barbu au sein d’une équipe de médecins en pleine opération.

Un film à revoir régulièrement pour en apprécier toutes les subtilités.

Mary Reilly

Mary Reilly - affiche française
Affiche française de "Mary Reilly"
FilmsFantastiques.com, L'Encyclopédie du Cinéma Fantastique
La chronique de Gilles Penso