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"Shining"

« All work and no play makes Jack a dull boy »

Shining - affiche

titre original "The Shining"
année de production 1980
réalisation Stanley Kubrick
scénario Stanley Kubrick et Diane Johnson, d'après le roman éponyme de Stephen King
photographie John Alcott
interprétation Jack Nicholson, Shelley Duvall, Danny Lloyd, Scatman Crothers

« Shining est un film optimiste. C'est une histoire de fantômes. Tout ce qu'il dit, c'est qu'il y a une vie après la mort, c'est optimiste. » (Stanley Kubrick)

Dossier pédagogique du CNC consacré à "Shining"
dossier enseignant et fiche élève

Critique extraite du Guide des films de Jean Tulard

Un film fascinant sur les phénomènes parapsychologique extrasensoriels.

La fin du livre de King, l'explosion de la chaudière, a été modifiée car trop convenue. « Il fallait », explique Kubrick, « une fin que le public ne put prévoir. » Jack Nicholson réussit à maintenir le suspense sur ses motivations jusqu'au bout.

Non seulement une attention très grande est accordée au son, mais utilisant une caméra steadycam, Kubrick multiplie les travellings et les fondus dans les scènes réalistes ; pour la partie imaginaire, au contraire, il privilégie les plans fixes. Ainsi naît un climat d'angoisse proche de celle des romans de Stephen King.

La critique de Pierre

Mardi soir dernier, j'étais malade comme un chien. Allongé sur mon canapé, j'étais sur le point de m'endormir. Tout d'un coup, j'ai entendu une voix, qui venait de la télé, et qui prononçait des dialogues qui m'étaient familiers : « ... et ils ont eu recours au cannibalisme pour survivre... Arrête, chéri, tu vas lui faire peur... Mais non, maman, je sais ce que c'est, je l'ai vu à la télé... Tu vois, chérie ? il n'y a pas à s'en faire, il l'a vu à la télévision... ». Instantanément, je dois le dire, j'ai reconnu "Shining", ce qui est assez normal, vu que j'ai vu ce film 150 fois. Cela dit, ça m'a fait lever un sourcil et ouvrir un œil. Petit à petit, je me suis dit que j'allais en mater 10 minutes de plus, et puis allez, encore un peu... et je l'ai terminé. C'est trop génial.

Le pitch : d'abord, c'est difficilement pitchable, et ensuite, tout le monde l'a vu.

On peut dire que la filmo de Kubrick est divisée en trois parties bien distinctes :
- première partie : Kubrick comme réalisateur "classique" pour les studios. C'est la période "Ultime razzia", "Dr. Folamour", jusqu'à "Lolita" ;
- deuxième partie : Kubrick révolutionne l'histoire du cinéma : ça commence avec "2001 : l'odyssée de l'espace" en 1968 (une rupture dans sa filmo, mais aussi dans l'histoire), jusqu'à l'échec public de "Barry Lyndon" en 1975 ;
- troisième partie : Kubrick cinéaste de film de genre ("Shining" et "Full Metal Jacket" - je sors "Eyes Wide Shut" de cette analyse, c'est un film trop spécifique et inclassable).
Bref, "Shining" intervient à un moment bien précis de la carrière de Kubrick : il a besoin de se refaire. Pour la première fois, il n'est pas visionnaire (comme pour "2001" ou "Orange mécanique"), il suit une mode qui a été tracée par d'autres, en l'occurrence celle des films d'horreur adaptés de Stephen King (en 1980, date de la sortie de "Shining", De Palma avait déjà bien balisé ce terrain-là). Autre originalité, pour une fois, Kubrick ne choisit pas un acteur "falot" ou désincarné pour le rôle principal. Dans "2001" ou "Barry Lyndon", les héros étaient effacés. Dans "Shining", Kubrick fait appel à Nicholson, qui était déjà un monstre sacré à l'époque. Donc, c'est un film plutôt original dans la filmo de Kubrick.

Il faut voir comment il va s'approprier ça, c'est génial. Il en a fait un film qui vient complètement de lui et de lui seul (King a d'ailleurs dit à maintes reprises qu'il détestait le film). Le bouquin parlait de plusieurs choses : un écrivain raté, ancien alcoolo (clairement un autoportrait, avec cette figure récurrente de l'écrivain chez King) ; un gamin avec des pouvoirs surnaturels ; et une force maléfique dans l'hôtel, en fait l'esprit d'Indiens enterrés en-dessous, qui prenait possession du père pour acquérir le pouvoir du môme. Dans le film, Kubrick brouille complètement les pistes et multiplie les niveaux de lecture. De fait, j'ai vu "Shining" 150 fois, mais je dois reconnaître que je ne sais pas complètement de quoi ça cause.

D'un côté, c'est l'histoire d'une famille qui va mal. On peut penser tout simplement que le père devient dingo. Mais en même temps, il y a au moins deux phénomènes surnaturels dans le film, qui ne peuvent pas s'expliquer de manière normale : 1) la porte du frigo qui s'ouvre quand Nicholson est enfermé dedans, 2) la photo de la fin où Nicholson apparaît comme ayant été un invité en 1921 (je ne sais toujours pas ce que ça veut dire).

Shining - 1921

Par ailleurs, plus je vois le film, plus mon avis change sur les personnages. En fait, il n'y a pas de méchant à proprement parler :
- le personnage de la mère me semble très intéressant. On sait que l'actrice, Shelley Duvall, a passé un mauvais quart d'heure à devoir jouer ce rôle et que ça a été difficile pour elle (travailler avec Kubrick et Nicholson, vu comment ils devaient se la péter, ça devait pas être marrant). Moi, je trouve qu'elle s'en sort très bien, et j'ai toujours adoré son personnage. En fait, le "shining", c'est elle : elle l'a sans le savoir (elle a des visions elle aussi à la fin du film), ce qui lui permet de trouver les ressources nécessaires pour s'en sortir.

Shining - photo 6

- le personnage du père est aussi moins clair qu'il n'y parait. On pourrait même penser que, d'une certaine manière, il aime son fils et qu'il se sacrifie à la fin. En proie à des forces qui le dépassent, il se laisse mourir dans le labyrinthe. Les "esprits maléfiques" lui jouent toute une comédie pour flatter tous ses bas instincts (le cul, l'alcool, le machisme, le racisme), mais d'une certaine manière, le mec finit par résister in extremis à ses pulsions mauvaises. Quoi qu'il en soit, on retrouve bien la thématique père/fils déjà présente dans "Barry Lyndon", sur un mode encore plus rude.

Shining - photo 7

Et puis, c'est difficile de parler de ce film sans évoquer la prestation gargantuesque de Nicholson. Il est impressionnant. Il cabotine comme un énorme porc, et c'est génial. Le mec utilise absolument toute la palette possible dont un acteur peut user : ses yeux, sa bouche, ses mains, ses cheveux, tout est expressif, et Kubrick ne se prive pas de le montrer sous tous les angles. Exemple : la gestuelle inénarrable de Nicholson, quand il marche énervé dans un couloir de l'hôtel, et qu'il s'agite dans tous les sens. Il faut dire qu'il est aidé, car les dialogues sont vraiment bons : « Quand tu m'entends taper... ou que tu ne m'entends pas taper, quoi que je sois en train de faire ici, ça veut dire "je travaille", ça veut dire "n'entre pas" ». Ou alors, ce moment absolument grandiose d'échange verbal entre Nicholson et Shelley Duvall : « Et QUAND crois-TU que l'on devrait l'emmener chez un DOCteur ? », avec ce moment où Nicholson imite Shelley Duvall en disant sur un ton plaintif et geignard « aussi tôt que possible ». C'est juste génial : c'est à la fois le mec qui se moque de sa femme, et Nicholson qui se moque de Shelley Duvall. C'est du grand acting.

Au final ? "Shining" est un chef-d'œuvre. Un vrai scoop, cette review !

Shining - All work and no play

Shining - redrum

Shining - jumelles

Shining - sang

Affiche alternative © Laurent Durieux
Affiche alternative © Laurent Durieux (variante)
Affiche alternative © Chris Thornley (Raid71)
BFI Film Classics © Mark Swan

Le making of de "Shining", première partie (vost)

Le making of de "Shining", seconde partie (vost)

Bêtiser Stanley Kubrick

Et si "Shining" avait été une comédie sentimentale ?

Affiche alternative © Graphic Nothing

© Last Exit to Nowhere

Shining - générique

Shining - générique

FilmsFantastiques.com, L'Encyclopédie du Cinéma Fantastique
La chronique de Gilles Penso